Il y a ceux qui rêvent leur vie
et ceux qui vivent leurs rêves

mardi 23 novembre 2010

El Gauchito Gil

Voici la légende de "El Gauchito Gil" dont le culte a permis à Guillaume et Anto de ne pas mourir de soif...
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Antonio Gil serait né dans la province de Corrientes, au milieu du XIX°siècle. A l’époque, le pays est secoué par de violentes luttes fratricides entre les unitaristes libéraux et les fédéralistes conservateurs. Or, Antonio Gil n’a que faire de ces rivalités politiques qui saignent les forces vives de la future Nation argentine. Lui, humble travailleur rural, n’a d’intérêt et d’yeux (plus littéralement) que pour la belle Estrella Diaz Miraflores, la fille du puissant « terrateniente » qui l’exploite. Or, sa misérable condition interdit toute possibilité d’union avec la jeune aristocrate. De fait, conscient qu’il s’agit d’un amour impossible, il décide de quitter la province qui l’a vu naître, pour s’engager auprès des forces militaires argentines dans le conflit de la Triple Alliance, contre le Paraguay (1865-1870). Par chagrin d’amour, il se fait soldat sanguinaire…
Cet épisode sombre marque un tournant significatif dans la vie d’Antonio Gil. A son retour, écoeuré par ce qu’il a vu et a sans doute pu commettre, il s’insurge contre tous les tenants de l’autorité traditionnelle, qu’ils soient gradés militaires, représentants économiques, ou dignitaires politiques. Ainsi, pendant une période indéterminée, il mène une lutte acharnée contre l’injustice, les abus de pouvoir, et les inégalités sociales. Accompagné de quelques fidèles parmi les fidèles, il écume les campagnes du Nord Est de l’Argentine afin de les souscrire au respect de la dignité humaine (en l’occurrence, celle du travailleur rural) et d’en détruire les foyers de misère. Pour certains, il est devenu un bandit des grands chemins ; un malfrat sans vergogne ; un scélérat à la tête d’une horde de paysans prêts à commettre toutes les exactions imaginables, pour soumettre l’autorité coutumière à la botte populaire. Pour d’autres, il s’est fait le justicier des humbles, un « robin des bois » sud américain qui « prenait aux riches pour donner aux pauvres », un idéaliste guevariste avant l’heure...
la légende du « Gauchito Gil » possédait déjà tous les canons qui font la force des mythes : 1) une trame épique, 2) épaissie par un tissu de mystères, 3) entourant une personnalité ambiguë, 4) qui a consacré une partie de son existence à des combats qui dépassent la simple condition humaine. De fait, la lutte d’Antonio Gil n’était en rien anodine. Elle recouvrait des revendications intemporelles. Son combat s’inscrit par la même, dans la longue tradition de ces conflits manichéens qui, depuis toujours, agitent l’Histoire des hommes : le riche contre le pauvre, le fort contre le faible, l’exploitant contre l’exploité, le possédant contre le possédé, l’offensant contre l’offensé…
Or, pour finir de construire une légende en gestation, il fallait une mort prématurée, injuste, aussi violente que celles qui faisaient les délices cathartiques des tragédies antiques. Elle vient un certain 8 janvier, sans que le gaucho idéaliste n’y oppose de résistance particulière. Arrêté dans d’obscures circonstances par le général Juan de la Cruz Salazar, il est accusé d’avoir refusé de réintégrer les bans de l’armée fédéraliste, fait prisonnier, et transféré à Mercedes, afin d’y être jugé pour désertion. Pourtant, sur la route qui doit le conduire au tribunal, le convoi s’arrête près d’un arbre qui ombrage le chemin de terre. Là, Antonio Gil est pendu par les pieds à la branche la plus robuste. En réalité, il n’aura pas le droit à un procès exemplaire…
Cependant, avant d’être exécuté, Antonio Gil adresse une ultime parole, demeurée célèbre, à son bourreau :
« Tu t’apprêtes à me tuer, mais quand tu vas rentrer chez toi, à Mercedes, en même temps que l’ordre de mon pardon (Antonio Gil était assuré de la protection d’un certain Velásquez, un militaire de haut rang qu’il avait vraisemblablement côtoyé lors de la guerre contre le Paraguay) tu vas apprendre que ton fils est tombé gravement malade. Aussi, après m’avoir égorgé, invoque-moi, pour que j’intercède auprès de Dieu Notre Seigneur, afin de sauver la vie de ton fils. Ainsi, tu comprendras que le sang des innocents sert les miracles. »
Le rire narquois qui s’échappe de la bouche du général Salazar ne laisse présager aucun espoir de salvation pour Antonio Gil. Bien au contraire. Alors que l’humiliation continue de plus belle entre les différents militaires du sinistre cortège, le sabre du général Salazar vient glisser au niveau de la glotte du gaucho… Sous les sarcasmes, ce dernier meurt dans une douloureuse mais silencieuse agonie. Son sang empourpre le chemin poussiéreux d’un rouge vif. Cette couleur deviendra le symbole du « gauchito Gil ».
A son retour, le général Salazar fait le constat, impuissant, du drame prophétisé par le gaucho au seuil de la mort : son fils est effectivement mourant. Conspuant sa faute et, plein de remords envers sa cruauté de militaire invétéré, il retourne sur les lieux de l’exécution sauvage, afin d’implorer la miséricorde de sa victime. Comme il lui avait promis, Antonio Gil lui accorde le pardon et sauve son fils d’une mort prématurée. Salazar, assassin de l’homme, devient ainsi le premier disciple du saint. Il s’empresse de construire une petite chapelle à sa gloire. Elle est rouge, comme la couleur du « sang des innocents qui sert les miracles ». La légende du « Gauchito Gil » est née... 
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Guillaume n'a pas d'appareil photo mais j'ai pu me procurer une photo du type de chapelle qu'il a utilisée pour trouver de l'eau :

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